Ces mots et expressions qui me font toujours autant marrer en suédois
J’apprends le suédois depuis un an et demi et je découvre chaque semaine de nouveaux mots et expressions. La langue suédoise n’est pas extrêmement riche mais elle a cette capacité de créer de nouveaux mots en collant plusieurs mots ensemble, ce qui permet de laisser libre cours à son imagination plus facilement. Pour les étrangers, c’est un calvaire au début, car il faut entraîner son cerveau à « voir » les petits mots à l’intérieur des longs mots.
Exemple : utomhusbassäng est en fait constitué de utom (en dehors), hus (maison), et bassäng (bassin). Accolés, ils signifient « bassin d’extérieur », utomhus étant un adverbe en lui-même qui signifie « à l’extérieur ». Bref, tout ça pour dire qu’au départ, c’est un peu difficile à voir. Mais une fois qu’on a compris ce système, l’essence des mots suédois se révèle enfin à notre conscience, et c’est là que ça devient drôle. En plus de ces mots composés, il existe une tripotée de petites expressions quotidiennes que les Suédois trouvent parfaitement normales évidemment, mais qui moi, me font beaucoup rigoler. Florilège.
Mormor, farfar, farmor…
Le premier exemple de cette liste démontre une caractéristique typique de la langue suédoise, qui s’applique d’ailleurs aux Suédois en général : leur capacité à être direct. Pourquoi se faire chier à dire un truc compliqué genre « grand-mère du côté maternel » alors qu’on peut simplement dire mère-mère ? Toutes les informations nécessaires se trouvent réunies en deux mots collés l’un à l’autre ! Et le top, c’est que ça marche avec tous les membres de la famille :
Moster = combinaison de mor (mère) et syster (sœur) qui veut dire… tante.
Farmor = père-mère, donc grand-mère du côté paternel.
Morfar = mère-père, donc grand-père du côté maternel.
Farbror = père-frère, oncle du côté paternel.
Mors mormor = à votre avis ? Mère-mère-mère ? Oui, c’est bien l’arrière-grand-mère du côté maternel ! Vous savez parler suédois ! :D
Grönsaker
Dans la même veine, nous avons grönsaker, qui se traduit par « légumes ». Innocent, dit comme ça. Mais quand on connaît la langue, on se rend compte que grönsaker est en réalité composé de deux mots, grön et saker qui signifient littéralement « trucs verts ». Tout le mépris pour ces aliments dégueulasses réunis en un mot : grönsaker. Il n’y a pas plus direct que ça.
Danskjävel
L’un des premiers mots que j’ai appris en suédois est (forcément) une insulte. Martin s’est fait un malin plaisir à me faire dire Käften danskjävel parfaitement, parce que c’est quand même la base. Mais que veut donc dire cette insulte ? Elle illustre un trait dont j’ai parlé dans un des tout premiers articles de ce blog, leur rivalité (gentillette) avec les Danois, car elle se traduit par « ferme ta gueule, putain de Danois ».
Mais la partie qui me fait le plus rigoler, c’est jävel, qui se traduit par « diable » en français. En effet, les Suédois, pourtant très peu religieux, utilisent le vocabulaire évangélique à foison, surtout dans leurs injures et leurs exclamations. Par exemple, si vous voulez dire que le temps est pourri aujourd’hui, vous allez vous exclamer : « Mon dieu, quel météo du diable aujourd’hui ! » (Herregud, vilket jävla väder idag !)
Du
Du est le pronom qui veut dire « tu ». La partie rigolote, c’est qu’il est aussi utilisé pour apostropher quelqu’un afin de capter son attention et lui faire comprendre qu’on a un truc à lui dire. Du coup, il arrive souvent qu’un collègue déboule à mon bureau ou celui de ma voisine, et commence sa phrase par « Du ? », ce qui dans ma tête donne toujours lieu à un replacement en contexte francophone plutôt comique. Imagine ton chef qui vient te voir et commence sa phrase par « Toi ? Tu veux bien m’expliquer un truc ? »
Jordgubbar
Personne ne sait vraiment d’où vient ce mot étrange. En suédois, jordgubbar signifie « fraises ». Quand on décortique le mot, on s’aperçoit qu’il veut dire littéralement « vieil homme de la terre ». Quel est le rapport ? Pas sûr. En tout cas, ça fait bien rire les immigrés comme moi. Et les Suédois aussi d’ailleurs, c’est dire à quel point c’est drôle, n’est-ce pas ?
*L’acquiescement par la respiration*
La première fois que Martin me répond avec ce son, je reste perplexe. Je repose ma question puisque je n’ai pas compris la réponse, et le voilà qui recommence. On dirait qu’il siffle, mais à l’envers, en inspirant l’air au lieu de l’expulser. Qu’est-ce qu’il a ? Est-ce qu’il est en train de s’étouffer avec un bout de pain ? Non, c’est juste une façon très normale pour lui de répondre oui : en faisant une sorte de bruit de succion très succinct avec sa bouche. C’est raffiné.
Haaaaaaay
Je ne peux pas écrire cette onomatopée autrement car c’est exactement comme ça que Martin la prononce. La première fois que je l’entends faire ce bruit de teubé, j’explose littéralement de rire. Il est au téléphone avec son grand frère Björn et le truc qui m’achève, c’est que j’entends Björn répondre exactement la même chose au bout du fil : « Haaaaaaay ». Pas d’exclamation, ni d’intonation, juste une longue syllabe plate et molle qui signifie « au revoir » et qui donne l’impression d’assister à une conversation de bourrés. Magique.
Dammsugare
Dans la veine des mots composés rigolos à traduire, dammsugare est un de mes favoris. Le jour où j’ai compris ce qu’il voulait dire, j’ai eu du mal à m’en remettre. En effet, dammsugare se traduit par « aspirateur ». Mais vous vous en doutez, ce mot à l’apparence innocente cache bien son jeu car il signifie mot pour mot… « suceur de poussière », damm signifiant « poussière » et sugare « suceur ». C’est beau.
Dammsugare, c’est aussi le petit nom d’une pâtisserie suédoise dégueulasse, le punschrulle. Il s’agit d’un truc à la pâte d’amandes et au chocolat fourré à l’alcool. Là, vous vous dites que seules les personnes de plus de 80 ans en mangent, n’est-ce pas ? Erreur ! Le punschrulle est apprécié par toute la population suédoise à l’heure du fika, même les gens d’âge décent comme Martin et son frère. Un jour, il faudra que je vous parle des pâtisseries suédoises, d’ailleurs… Bref, toujours est-il que les punschrullar ressemblent un peu à des aspirateurs, alors les Suédois leur ont donné ce surnom. Une information existentielle, je sais bien.
Att hålla tummarna
Le petit dernier de cette liste est une expression idiomatique qui veut dire « se tenir les pouces ». Effectivement, les Suédois ne croisent pas les doigts pour souhaiter chance à quelqu’un. Non, ils se tiennent les pouces ! Et bien sûr, ils font le geste en même temps qu’ils le disent, avec l’air le plus sincère possible. Personne ne sait si ça marche mieux que le croisage de doigts, mais vu la situation économique du pays comparée à celle des pays qui croisent les doigts, je dirais dans l’ensemble que oui.
15 Commentaires
Très drôle cet article. Et même si je ne vais rien retenir de tous ces mots, j’avoue que les mères grand-mères et autre oncle paternel m’ont amusé.
Tres bien écrit. Je me suis bien détendue en te lisant! Hâte de lire ton article sur les pâtisseries du pays:-)
Merci Béatrice !
Je me suis bien bidonné! Bravo, tu as du style!
Ahah, merci Romain :D
Jättebra och underhållande skrivet! ?
Du har förstått vår förkärlek för sammansättningar, direkthet och ekonomisering ??
C’est amusant de comprendre ce que vous trouver drole.
Tack Ulrika :D
Bravo! Super article.
Merci !
Merci Marine! Petite question, Martin ne serait pas de Norrland? *L’acquiescement par la respiration* en Suède est surtout utilisé au nord et dans la communauté de finlandais suédois. ( https://sv.wikipedia.org/wiki/Inandnings-jo )
Bonjour ! Non il est de Malmö, mais il n’est pas le seul que j’entends faire ça ici. Certains de mes collègues (que des hommes d’ailleurs) répondent parfois comme ça aussi.
Merci de cette article amusant. Je suis d’accord avec tout ce qui a déjà été dit. Alors, les pâtisseries suédoises… vous allez pouvoir en dire d’autant de drôleries!
Merci! Je suis d’accord avec tout ce qui a déjà été dit. j’attends l’article suivante avec impatience !
Super article j’ai beaucoup rigolé et mes colocs suédois aussi ?
Merci Augustine!